Web
Avec les gars de Bananeapp, l’appli’ qui ringardise la lettre de motivation
Si la lettre de motivation fait partie du protocole minutieusement inculqué, elle est, aujourd’hui, une espèce en voie de disparition. Bananeapp, start-up lausannoise, en est le plus récent exemple. On a voulu rencontrer les gars qui nous feront gagner du temps dans nos recherches de jobs étudiants.
Le soleil tape fort sur le parking de l’EPFL Innovation Park. Je déambule entre les voitures électriques. Je me repère, me perds, me reperds. Je découvre, malgré moi, le quartier d’une « ville dans la ville ». Après quelques minutes, je finis par trouver le bâtiment dans lequel siège la start-up. Et c’est dans un bureau, petit mais ambitieux, qu’Arnaud Cachin, 26 ans, co-fondateur et responsable communication de Bananeapp, me reçoit.
L’application smartphone promet une chose : aider les étudiants et jeunes diplômés à trouver un premier emploi, un petit job ou encore une place de stage. Tout ça sans CV ni de lettre de motivation. « Entre en contact direct avec le recruteur via une messagerie instantanée », surenchérît la boîte, sur un site web pop-fluo-responsive.
Pour aider Arnaud à « manger la banane par les 2 bouts » : Christophe Badoux (32ans), CEO et responsable produit, ainsi que Matteo Knobel (24 ans), co-fondateur et responsable client. Les deux cadets sont fraichement diplômés HEC. Quant au patron, « c’est un serial-entrepreneur et un véritable crack en design et en développement, estime Arnaud. Il développe notre application de A à Z depuis un peu plus 8 mois. Christophe est totalement autodidacte, précise le responsable com’ avec un peu de fierté ».
Tout cela est très bien, mais comment se passe le processus de sélection et les études de dossiers ? Arnaud m’explique confiant : « À vrai dire, en 2017, un étudiant n’a plus envie de préparer un dossier complet, avec une lettre de motivation réunissant toutes les formules bateaux possibles. Si c’est pour un petit job à peine défrayé, qui lui permettra juste de se payer quelques bières en soirées, il abandonnera, c’est sûr, ironise-t-il. Donc, pour ce genre de cas, il faut quelque chose de rapide. » Par « rapide », le responsable communication de Bananeapp entend une réduction importante de l’attente, « une candidature en 3 clics », un processus en moins de 5 étapes :
- Passer les annonces ;
- Consulter les détails ;
- Échanger avec le recruteur ;
- Attendre la notification.
Pour pouvoir converser avec le service RH de l’entreprise convoitée, le candidat devra répondre à une question préalablement définie par le recruteur. Arnaud Cachin précise encore : « Par souci de parité entre les candidatures, l’utilisateur n’aura que 140 caractères pour séduire ». Je lui fait part de mon étonnement quant au nombre restreint de signes autorisés, il reprend : « On le teste tous les jours avec Twitter, non ? C’est certes restrictif, mais cela permet d’aller à l’essentiel, sans surjouer. Ensuite, si l’entreprise est conquise par la réponse, le candidat recevra la fameuse notification qui lui filera la banane. À partir de ce moment-là, la messagerie instantanée sera débloquée, et ce de façon complète et durable. »
Voilà bientôt 45 minutes qu’Arnaud me présente Bananeapp. Avec un tel engouement qu’on en oublierait presque la suractivité de la débroussailleuse en bruit de fond.
Bien que le sujet soit souvent tabou, c’est en toute décontraction que le co-fondateur de 26 ans aborde les finances de la start-up. Combien pèse la banane ? « Pas grand-chose. Rien, pour le moment. C’est toujours super difficile de capitaliser un projet en développement », affirme le licencié HEC. Aujourd’hui, les 3 patrons financent l’entreprise de leur poche, en attendant qu’un investisseur signe pour leur permettre d’en vivre : « Le dossier d’investissement a récemment été envoyé. Mais, comprends que, actuellement, nous avons tous un ou deux jobs étudiants, à côté de Bananeapp ». Parallèlement à ses activités de responsable communication, Arnaud conserve, par exemple, une activité de maître nageur dans une piscine publique. « Par contre, la situation est pour l’instant tout à fait viable, rassure mon interlocuteur. Puisque nous n’avons pas besoin de faire appel à un développeur externe, nous avons pu minimiser les coûts au maximum. Depuis le début de l’aventure, en janvier, nous n’avons pas dépensé plus de 500 francs. »
Après le financement, il y a évidemment la rentabilité ; une étape à laquelle beaucoup de jeunes entreprises échouent. Mais, là encore, l’équipe a pensé à tout. Afin de rester dans quelque chose de réaliste, Christophe, Matteo et Arnaud souhaitent proposer au micro-entreprises et start-ups de la région de payer la publication de leur annonce dans l’application. Si le fonctionnement s’applique à la plupart des moteurs de recherche d’emploi, souvent, les tarifs sont des freins importants pour les nouvelles organisations. « Sur le site d’emploi numéro 1 en Suisse par exemple, les prix sont totalement inaccessibles à des petites sociétés [de 650 à 825 francs par mois, ndlr.]. La plupart du temps, l’annonce est fortement relayée. Mais sans garantie de trouver son futur collaborateur », argumente Arnaud Cachin. Ce que Bananeapp veut donc faire c’est proposer des tarifs allégés (entre 30 et 260 francs par annonce) et modulables, ainsi que réduire le public cible dans le but de renforcer les compétences. Actuellement, une vingtaine de structures font confiance aux 3 entrepreneurs.
Enfin, lorsqu’on demande à Arnaud quels sont leurs prochains objectifs, il répond : « Actuellement, depuis juillet, l’appli’ est disponible en Bêta [en test, ndlr.] sur iOS. Donc, notre priorité, c’est de corriger les éventuels bugs, avant de la proposer sur Android ». Il rit, puis finit par ajouter : « En dehors des futures fonctionnalités, on aimerait créer la plus grande communauté d’étudiants en Suisse et devenir leur référence dans la recherche de jobs ». Reste à savoir maintenant si les RH suivront le mouvement. On va peut-être leur envoyer un courrier.
Bananeapp est sur Facebook et l’App Store.
Arts
Et si le Web mourrait demain ?
À l’occasion des 30 ans du World Wide Web – créé au CERN en 1989 –, plus de 50 artistes et professionnels prendront part au 15e Mapping Festival, du 23 au 26 mai 2019, à Genève.
Il y a tout juste 30 ans, à Genève, naissait le World Wide Web (WWW). Trois décennies plus tard, la possibilité d’un effondrement de la Toile fait frémir.
«La fin d’Internet serait-elle pour bientôt ?», c’est la question que se sont posés les organisateurs du Mapping Festival. Depuis 2005, l’événement genevois se donne pour mission de favoriser les échanges et participer activement au développement du milieu des arts numériques. Ainsi, l’exposition The Dead Web – La fin viendra, au travers des arts, imaginer notre vie sans Internet.
Artistes suisses et québécois à l’honneur
Initialement composée de cinq artistes québécois, The Dead Web – La fin accueillera spécialement pour le Mapping Festival trois artistes suisses sélectionnés par le biais d’un appel à projets lancé début 2019. Les oeuvres présentées, qui plongeront le public dans un futur sans Internet, se veulent révélatrices de l’omniprésence du Web dans nos vies quotidiennes. Vernie le jeudi 23 mai, l’exposition s’étendra jusqu’au 2 juin, au Commun.
La créativité numérique à son apogée
Lors de ce vernissage, le DJ genevois Estebahn proposera un set entre downtempo, jungle et électro. Le week-end suivant, la Fonderie Kugler se transformera en laboratoire audio-visuel. Le vendredi 24, la performance délirante de Freeka Tet sera suivie du collectif russe Tundra, qui présentera sa toute dernière création, « Nomad », combinant vidéo et laser. La soirée se clôturera en beauté avec un DJ set du suisse Acid Kunt. Le samedi, ce sont Grand River & Marco C qui lanceront les festivités avec leur projet « 0,13% », voyage poétique entre humain et nature. La scène sera ensuite foulée par le duo Recent Arts (Tobias. et Valentina Berthelon) accompagné de Barbie Williams, avec « Skin », concert audiovisuel expérimental. La soirée terminera avec la DJ genevoise Audrey Danza.
Web célébré, Web interrogé
Lors de la troisième édition du forum «Paradigm_Shift», le public sera invité à explorer les impacts de la production abusive de nouvelles technologies. Sur deux jours, le Forum verra s’enchaîner tables rondes et conférences. Le vendredi débutera avec une prise de parole de Mark Garrett, co-fondateur de Furtherfield, suivi de «E-wasteland», une table ronde qui interrogera le gaspillage dans l’art numérique. En guise de clôture, le panel «The future web» – tenu en français – s’appuiera sur la thématique de l’exposition en repensant à l’impact d’Internet sur nos vies et à sa potentielle évolution. Nathalie Bachand, commissaire de l’exposition The Dead Web – La fin, participera à l’événement avec l’artiste Romain Tardy et Alexandre Monnin (président d’Adrastia), le tout modéré par Nicolas Nova.
Le 15e Mapping Festival se déroulera du 23 au 26 mai 2019, à Genève – www.mappingfestival.com
Web
Realsousgare, le compte Instagram qui balance les bobos lausannois
Le compte Instagram Realsousgare connaît depuis une semaine un succès fulgurant. Y sont postés des memes, qui tournent en dérision les bobos lausannois, habitant le « si trendy » quartier sous-gare.
Derrière cet humour sarcastique se cache un jeune Lausannois de 17 ans, qui souhaite rester anonyme. Surpris de son succès, il y trouve pourtant une explication : « Je pense que ça marche parce que les gens se reconnaissent dans mes publications. Ça faisait plusieurs années que je remarquais que le quartier sous-gare de Lausanne avait une certaine réputation, qu’il était en vogue. Et c’est simplement pour me moquer de ce phénomène que j’ai commencé à faire des memes, qui sont devenus de plus en plus critiques ».
Véritable phénomène de société, le meme est une image – souvent humoristique et décalée – qui est diffusée sur les réseaux sociaux. Et pour l’auteur de Realsousgare, cela va plus loin, les memes sont une satire sociale : « Ils sont un moyen de communication très efficace, très nouveau, très instantané, qui permet de rebondir facilement avec les évolutions à court terme, l’actualité, etc. C’est une vraie culture sur les réseaux sociaux. C’est même une forme d’art, sans vouloir être prétentieux ».
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Les victimes de Realsousgare sont les bobos – les bourgeois-bohèmes et leurs clichés : parents aisés, sensibles à l’écologie, situés politiquement plutôt à gauche et habitant les quartiers huppés. Pourtant, le Lausannois se défend de « taper sur les bobos » : « Je critique une catégorie de la population et de la société, qui existe dans beaucoup de pays, et qui est incarnée à Lausanne par ce qu’on appelle “les bobos”. Je critique avec désinvolture et cynisme leurs comportements, leurs habitudes, leurs modes de vie et leurs opinions. Absolument tout ce qu’ils incarnent en somme ».
En effet, les bobos semblent agacer passablement. Le créateur du profil a son explication : « Derrière, il y a une forme d’hypocrisie ou d’aveuglement vis-à-vis des réels problèmes de ce réjouissant début du 21e siècle. Réchauffement climatique, dégâts du capitalisme, guerres, injustices, entre autres. Ce qui m’agace légèrement (et je ne suis pas le seul), c’est les contradictions [des bobos, ndlr.] : faire du vélo, mais prendre l’avion, se soucier des conflits, mais ne pas s’engager, se plaindre des injustices sans les confronter, et dénoncer des inégalités tout en vivant dans une région extrêmement privilégiée ».
Et pourtant, l’auteur de Realsousgare est un peu bobo – vous l’auriez deviné ? « J’aime la culture, je fais du vélo et je vais parfois dans des magasins de seconde main. Je crois que l’endroit dans lequel on vit nous conditionne inévitablement (rires) », explique-t-il enfin.