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Ça se lit “Demustreisun” – et c’est le premier album d’Albert Chinet
Un visage anguleux à la James Dean, une pilosité faciale changeante, un physique plus que longiligne, un flegme inébranlable, voilà le croquis sans retouche d’Albert Chinet, 22 ans.
« Albert voudrait être orthodontiste, mais sa famille et ses proches ne le lâchent pas avec cette histoire de musique… », titre la biographie du Lausannois. Effectivement, quand on est pendant longtemps le batteur d’un certain Sarcloret, difficile de faire autre chose. Sacloret, 66 ans, grand chanteur francophone, son père, paraît-il. Pourtant, à l’écoute de “Demustreisun“, son premier album, difficile d’en faire le rapprochement. Chinet l’explique : « Il paraît que tout le monde écoute de tout. Alors, moi aussi. Du coup, j’aime bien mélanger des influences électros, avec d’autres, plus folk et rock comme Tom Waits – dont je rêverais d’avoir la voix, mais c’est mort, je ne bois pas suffisamment de scotch – ou Bob Dylan. En l’occurrence, Sarclo’ est un grand fan de Dylan ! Mais pour en revenir à ce mélange, il est fait dans le but d’éveiller une certaine curiosité chez les gens. »
Albert étonne. Un peu pince-sans-rire, posé, mais pas blasé, il écrit la musique. Même que, selon lui, il « l’écrit dans sa tête ». On ne le comprend pas bien l’Artiste. Il part dans une idée, un fantasme, un délire… Et puis, d’un coup, on le rattrape, il atterrit et développe : « J’ai écrit des chansons sans support physique en bossant pour la Soupe Populaire. Les civilistes sont généralement assignés à surveiller la queue. C’est pas foufou, pas méga-intéressant et ça demande peu cognitivement parlant. Alors, j’écrivais de tête. »
C’est une langue morte, un peu comme l’industrie du disque.
Sans doute trop modeste, lorsqu’on le surnomme « Monstre de musique », il ne réagit que très peu et continue à raconter l’histoire de ce 10 titres, que le paternel qualifie d’album et que le fils définit comme un hybride entre album et démo’. « Et notons que Demustreisun veut dire la “démonstration” en anglo-normand », notifie Albert Chinet. Et pourquoi ce titre ? « Car c’est une langue morte, un peu comme l’industrie du disque. Et puis, c’est intrigant visuellement. Un peu comme “orthodontiste”. »
Mais avant que l’album pointe le bout de son nez, Albert a trafiqué ici et là. Une période qu’il affectionne particulièrement : la production. GarageBand, Pro Tools, Logic Pro… nuée de logiciels de MAO (musique assistée par ordinateur) est venue accompagner le Lausannois et Didier Lemarchand, ingénieur son « aux oreilles hyperbioniques » : « Il a vraiment fait un taf monstrueux pour le mastering final de l’album. » Et pour le visuel, car la cover pèse lourd, « on remercie Quentin Maillard aka Le Maille. »
Et, excepté le dessin (quoique ?), Albert fait tout, tout seul : « J’ai toujours tout fait moi-même et c’est encore le cas sur cet album. Ce qui veut dire que sur chaque chanson que vous entendez, je suis le gars à la batterie, au piano, le chanteur, le type qui boit sa bière en regardant les autres bosser, le mec qui met une heure à s’accorder entre chaque prise. Bref, tout le monde. » Dans un studio – mi-Batcave mi-chambre de geek – aménagé dans le sous-sol de son chez-soi, « avec l’aide de gens super », et après avoir récolté quelque 5’950 francs en crowdfunding, Albert a donc mis une petite moitié d’année pour livrer les 500 albums physiques et la version digitale de la démonstration. « Mais, j’avais ce projet en tête depuis des années et ce que vous entendez dessus a commencé à être écrit en 2013, dans cette perspective », complète-t-il.
Et lorsqu’on parle revenus, avec une fausse fierté et beaucoup d’autodérision, il annonce : « Demustreisun a généré 5.28 francs, en ligne. Heureusement, le gite est fourni par ma maman ». Mais, il indique en parallèle qu’à 22 ans, il n’y a pas grand-chose d’autre à faire que d’apprendre pour évoluer.
Enfin, lorsqu’on lui demande d’où viennent ses chansons, il parle de sa copine (Joan of Arc), de sa maman (Orange), de vieilles connaissances et de refrains qui tournent en tête (Little Stone Waltz). Et pour cette dernière compo’, « tous les couplets ont été écrits en 45 minutes, au boulot, à la Soupe Populaire. La mélodie de Zolan, pareil. »
Avec indulgence, vigueur, et bonhommie, le Prince est doué, autant en musique que lors de ses matchs d’impro’. Comme dirait Albert Chinet : « Vala-vala ».
Albert est sur Facebook et Instagram.
“Demustreisun” est à retrouver sur toutes les plateformes de téléchargement et streaming légaux.
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João Gilberto, bossa supernova
Le chanteur brésilien João Gilberto, précurseur de la bossa-nova, est mort samedi à 88 ans.
Samba, plus jamais. João Gilberto n’est plus. Le papa réfractaire de la bossa-nova est mort samedi à 88 ans a annoncé son fils, João Marcelo, sur Facebook.
Souvenirs d’ici
Un vieux microphone à condensateur, la gratte légère et le flegme de la cidade maravilhosa (la ville merveilleuse). Il n’en fallait pas plus, à l’époque, pour faire frémir le Montreux Jazz Festival, un soir de juillet 1985.
Pourtant, 34 ans plus tard, en ce soir de juillet 2019, le micro restera sourd, la gratte veule et Rio pleurera. Pleurera «o mito» (le mythe), parti sans doute rejoindre Loalwa Braz, Vinícius de Moraes ou encore Nelson Ned.
Samba de maître
Il fascine, João Gilberto. D’un revers de guitare, il ouvre la voie au génie de Caetano Veloso, Gilberto Gil et Tom Zé. Même que, selon les légendes du petit monde des grands musiciens, il influença le jazz d’un certains Miles Davis. Fastoche.
Ces dernières années, plombé par des dettes, dépossédé de ses droits, miné par des procès à rallonge, l’homme s’est «volatilisé» des radars médiatiques.
Le 6 juillet 2015, seule une vidéo sur YouTube le montrant, affaibli, fredonner avec sa fille, Luiza, le fit «ressurgir». Où était-il ? Que faisait-il ? Il sera dès lors le sujet de bien des rumeurs et fantasmes. Sa famille assure qu’il va bien et continue de «gratter». Il en sera une des dernières apparitions du musicos.
«La bossa nova je ne sais pas ce que c’est»
«La bossa nova je ne sais pas ce que c’est. Moi je joue de la samba», a-t-il assuré en 1961, au moment de publier son troisième 33 tours. En face A, on y trouve, pour exemple, une version de Samba da Minha Terra, le classique de l’un de ses maîtres chanteurs, Dorival Caymmi.
«Il peut bien sonner même en lisant un journal», dit un jour de Gilberto le draconien Miles Davis. C’est certainement là, encore plus que tout le reste, que résidait le miracle du Bahianais.
Jamais pris en flagrant délit de mauvais goût, toujours prompt à apposer quelques vers sur quelques notes. Le chanteur aura clairement redonné ses lettres de noblesse au mot «interprète». Lorsqu’il n’est pas l’auteur d’un céleste canção.
Sélection musicale de Malick Touré-Reinhard.
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“Les 6 Chemins” du SexoapCrew, un premier EP en dehors des sentiers battus
Le collectif rap bullois SexoapCrew a dévoilé samedi Les 6 Chemins, un premier EP aux styles multiples, mais volontiers plaisants. Interview. Chose promise, chose due, c’est le 25 mai dernier que le SexoapCrew a dévoilé son premier EP intitulé Les 6 Chemins. De passage dans nos colonnes en décembre 2018, l’équipe originaire de Bulle est composée de six identités : Tacchini, Sunem, Dom, Simcheck, AR et SGK. SexoapCrew est un shakeur dans lequel les saveurs ne peuvent être parfaitement reconnues tellement elles sont nombreuses. Une chose est sûre, cependant : le cocktail est frais mais aussi à portée de toutes et tous. En janvier 2019, le SexoapCrew ouvrait les hostilités avec le clip de «Guérilla». Quatre mois plus tard, il nous revient avec «Sancho» et annonce enfin la sortie d’un premier EP pour le 24 mai. Suite à un souci technique, l’oeuvre arrive le lendemain sur les plateformes. Et c’est dans un bar de Fribourg que le SexoapCrew nous parle de cette première «naissance» par voie digitale.
Slash : Quoi de neuf depuis décembre ? Tacchini : Lors du concert à Fri-son, on t’avait parlé d’un premier projet qui devait sortir en début d’année, ça a pris un peu plus de temps que prévu par rapport au mixage et notre implication dans ce projet. Sinon, on s’est calmés sur les concerts, afin de privilégier le travail en studio et trouver notre ADN. Vous sortez votre premier EP Les 6 Chemins. Comment a-t-il été conçu ? AR : Il a été conçu assez naturellement. On s’est isolés dans le chalet – ou plutôt dans l’appartement – de Dom, à La Tzoumaz [en Valais, ndlr.] . On y est allés trois week-ends, on a pris tout notre matériel pour enregistrer, on a écrit nos textes et voilà comment onze titres ont vu le jour, pour en garder huit. Pourquoi Les 6 Chemins ? SGK : On est six personnes, on a chacun notre vie, nos expériences et on s’est croisés à différents moments. Depuis, nos six chemins ne font plus qu’un, c’est-à-dire celui du SexoapCrew, tout en gardant notre parcours de vie personnel, qui fait l’identité de chaque membre. Simcheck : Ces six chemins vont au final dans le même sens. On a différents avis, par exemple dans le rap et la musique. Cependant, la direction dans laquelle on se dirige reste commune. Dom : Même au niveau textuel, c’est très diversifié et c’est lié à ce que SGK a dit.
Comment vous fonctionnez pour la création de vos chansons ? Vous avez un mode d’emploi ? Tacchini : On n’a pas de mode d’emploi, on ne s’est pas fixés de thème pour les morceaux… Une fois le son enregistré, le sujet était présent. C’est la force des six chemins. Sunem : À chaque morceau, AR a mis sa touche. Peu importe l’instru’, il a fait quasi tous les refrains de l’EP. Cela nous a mis dans un même esprit, car les refrains tournaient en boucle pendant qu’on écrivait. En fait, on s’est basés là-dessus. SGK : On met l’instru’, chacun «gratte» son texte – de son côté ou sur son chemin. À la fin, on met nos écrits en commun et on regarde comment créer les meilleurs «combos» – qui va commencer, suivre, conclure. Dom : Le fait d’imposer un thème, je ne pense pas que ça soit quelque chose qui marche. Il faut être assez libre sur ce qu’on écrit. Les refrains que AR a posés, ont permis de créer un univers et le son crée le thème. Un mot ou une phrase qui illustre l’ensemble de votre EP ? SGK et Simcheck : C’est le «Sancho». Avant de faire du rap, nous étions déjà des potes. On est tout le temps ensemble, on fait tout ensemble, c’est comme la famille. On s’appelle le «Sancho», parce qu’on est comme une veine dans laquelle coule un seul et même sang, sans oublier qu’on est chauds aussi.Dès la première piste, «Expo», vous dites «tout ce qu’on vise c’est les trophées, faire du cash…» De quel(s) trophée(s) parlez-vous ? C’est possible avec un premier projet ? Simcheck : Pour nous, rien que de rapper ensemble et de pouvoir promouvoir ça dans notre ville, que les gens reconnaissent notre travail, c’est déjà un trophée. Peu importe le cash que ça apporte derrière. Nos trophées sont le résultats du travail mis à l’ouvrage (sic.). C’est récolter ce que l’on a semé. AR : Trophée ne veut pas dire «avoir un Disque d’Or». Se produire sur scène devant ma famille, mes potes, mon entourage, ou devant des gens qui paient une entrée pour venir nous voir, recevoir un cachet, c’est un trophée. Tout le monde a besoin de «cash» et si on peut en gagner en faisant ce qu’on aime, c’est parfait. SGK : Le trophée est dans le sens d’accomplir quelque chose. Ce sont des victoires, en regardant de quoi l’on est parti. Ce qu’on fait est devenu plus «carré», il y a du travail dans notre art. On parle souvent de cash parce que la vie est ainsi faite, mais on est aussi très «Sancho». On oublie pas que la famille est plus importante que l’argent. Sunem : La suite du texte dit «faire du cash pour ensuite coffrer», cela signifie que que l’on a cette envie de mettre bien les nôtres (sic.). Prendre soin de la famille et tout ce qui va avec. Dom : Tu dois aller chercher ton argent, être là, présent, déterminé et faire les choses.
Cinquième titre, «Guérilla» : qu’est-ce que signifie «on sourit pour serrer les dents» ? Avez-vous tendance à avoir la bouche trop ouverte ? SGK : C’est pas une question d’avoir la grande gueule. C’est juste que la vie peut être dure par moment, mais on a la chance d’être en Suisse, par exemple. On sourit même si tu peux avoir des douleurs. Tacchini : C’est vrai qu’on a des énormes gueules au quotidien. En même temps, c’est un défaut mais aussi une immense qualité, parce qu’on se dit les choses. On n’a pas peur de dire si l’un de nous a écrit un couplet de merde. On se le dit gentiment quand même. On sait aussi comment apaiser les tensions entre nous. Des fois, ça explose mais on revient toujours à l’état de potes. Dom : On n’oublie pas que nous sommes des potes à la base. Même si on s’engueule, on sait qu’il y a pas de problèmes à la base. Quand est-ce qu’on vous revoit sur scène ? Tacchini : Nous serons en concert le 15 juin à Ebullition [centre culturel situé à Bulle, ndlr.] avec Slimka, Di-Meh, Daejmy, Shaim & Santo. Pour les autres dates, ce sera à suivre sur nos réseaux sociaux.
«Les 6 Chemins» est à retrouver sur toutes les plateformes de téléchargement légal – www.mx3.ch/sexoapcrew.