Tribune
Slash Média dénonce les propos abjects envoyés à son rédacteur en chef
La rédaction de Slash Média a pris connaissance d’un message d’une extrême violence envoyé à son rédacteur en chef, Malick Touré Reinhard, par un individu se revendiquant membre du mouvement Résistance Helvétique, suite à son portrait paru dans Le Temps du 23 mars 2018.
Si le groupuscule proche des milieux d’extrême droite assure « n’avoir jamais entendu parlé ni de M. Reinhard, ni de son agresseur (dont on distingue uniquement une photo de profil) » et demande à « M. Reinhard de publier publiquement le nom de cet personne qui n’appartient pas, et n’a jamais appartenu, à notre organisation ainsi qu’à porter plainte contre lui », la rédaction de Slash Média tient à faire remarquer à ses lectrices et lecteurs qu’il est curieux que Résistance Helvétique puisse affirmer de telles choses sans connaître l’identité de l’expéditeur du message. La rédaction de Slash Média aurait trouvé plus approprié que le groupuscule dénonce en premier lieu l’idéologie puante de l’agression verbale plutôt que de crier à une supposée manipulation de « la gauche pour les salir ».
Aussi, Slash Média tient à réaffirmer sa ligne éditoriale. Les contenus rédigés par la rédaction, et donc disponibles sur le site internet du média, ne sont pas orientés politiquement. Des sujets et des personnes aussi hétéroclites qu’originaux sont régulièrement présentés, avec le soin de ne pas montrer une vision unilatérale du monde et l’exigence de la rigueur journalistique indispensable à tout contenu de qualité et vérifié. Si les articles de Slash Média ne sont pas militants, son équipe, profondément humaniste, reste toutefois très attachée à certaines valeurs comme la tolérance, la liberté et surtout le respect des lois. Ces principes-là ne sont pas l’apanage de « la gauche », contrairement à ce que semble penser Résistance Helvétique.
Nous souhaitons également souligner le fait que Résistance Helvétique, par sa communication, participe, volontairement ou non, à la propagation de propos racistes, fascistes et dangereux pour la sécurité publique.
Par ailleurs, Slash Média n’exclut pas de porter l’affaire en justice. Après le choc subi à la suite de la réception de ce message abject, la rédaction ressent le besoin de se rassembler et d’étudier à tête refroidie toutes les suites envisageables. Toutefois, pour l’instant, aucun nom ne sera divulgué, afin de préserver le droit à la vie privée, propre à chaque individu.
Enfin, merci à vous, chères lectrices, chers lecteurs, pour votre soutien mais aussi pour vos critiques qui sont indispensables à nos saines remises en question. Avec vous, et dans notre travail rédactionnel, nous continuerons d’essayer de faire toujours plus et toujours mieux, car c’est le minimum que vous méritez. Et nous en sommes pleinement conscients.
La rédaction de Slash
Récit
Les femmes cellophanes #3 : Sylvia Earle, biologiste marine
Durant la projection du documentaire Sea Of Life au Festival du film vert de Nyon, je me rappelle soudain de Sylvia Alice Earle.
Plongée dans les abysses des documentaires Netflix, j’avais fait la connaissance de ce nom dans Mission Blue. Ce documentaire traçait les aventures et les découvertes de Sylvia Earle, biologiste marine et pionnière de la plongée moderne, le « scuba diving ».
A la fin de la projection, un débat éclate. Certains pensent que le film est « trop positif », que l’on ne voit pas les ravages que font la pollution sur les mers et les océans. D’autres, au contraire, se réjouissent de voir que la cause n’est pas perdue, qu’il y a encore de l’espoir. J’invite donc chacun à regarder Mission Blue, qui introduit le concept créé par Sylvia Earle, les « Hope Spots ». Ces spots sont des zones écologiquement uniques dans les océans, tels que des aires marines protégées (AMP) nécessitant une attention ou de nouveaux sites. Ils sont choisis pour leur contribution à la biodiversité, aux puits de carbone et à leur habitat important.
Dans la salle, personne ne semble connaître cette femme. Pourtant, je suis entourée de biologistes marins, de plongeurs… C’est pourquoi j’aimerais dédier ce troisième volet des « Femmes cellophanes » – notre série consacrée aux femmes « oubliées » – à cette incroyable biologiste marine, Sylvia Alice Earle, parfois surnommée « l’esturgeon général ».
Earle naît en 1935 dans le New Jersey. La famille déménage sur la côte ouest de la Floride, où elle développe ses premiers intérêts pour le monde naturel. Earle obtient son baccalauréat en Sciences à la Florida State University en 1955 et sa maîtrise en Sciences l’année suivante. Elle obtient également un doctorat en Philosophie, en 1966, à l’Université Duke.
Ses études achevées, elle travaille un an en tant que chercheuse à Harvard, puis retourne en Floride en tant que directrice résidente du Cape Haze Marine Laboratory. En 1969, elle demande à rejoindre le projet Tektite, une installation située à cinquante pieds en-dessous de la surface de la mer au large des îles Vierges, qui permettait aux scientifiques de vivre dans leur zone d’étude pendant plusieurs semaines. Bien qu’elle ait enregistré plus de 1’000 heures de recherches sous l’eau, Sylvia Earle est rejetée du programme. Mais elle ne perd pas espoir et se présente l‘année suivante pour l’expédition Tektite II. La biologiste est cette fois sélectionnée pour diriger la première équipe féminine d’aquanautes.
De 1980 à 1984, elle siège au Comité consultatif national sur les océans et l’atmosphère. Pendant cette période, elle et son futur mari, Graham Hawkes, ingénieur et designer sous-marin, fondent Deep Ocean Engineering, afin de concevoir, exploiter, soutenir et consulter des systèmes sous-marins pilotés et robotisés. En 1985, l’équipe construit un sous-marin de recherche qui fonctionne jusqu’à 1’000 mètres de profondeur, le Deep Rover. Il est testé l’année suivante et Earle rejoint l’équipe de formation au large de Lee Stocking Island, aux Bahamas. En 1986, la femme bat le record du monde de profondeur en plongée : 381 mètres.
En 1992, elle quitte son poste et fonde Deep Ocean Exploration and Research pour faire avancer le génie maritime. La société, maintenant dirigée par la fille d’Earle, Elizabeth, conçoit, construit et exploite des équipements pour les environnements en haute mer.
Chef de file des expéditions Sustainable Seas Expedition, un programme quinquennal parrainé par la National Geographic pour étudier le United States National Marine Sanctuary de 1998 à 2002, elle est aussi présidente du conseil de Harte Research Institute pour les études sur le golfe du Mexique, et présidente du Conseil consultatif pour l’océan dans Google Earth.
En 2010, Earle est invitée à parler devant 3’500 délégués et ambassadeurs des Nations Unies durant la conférence sur le modèle de La Haye. Deux ans plus tard, la biologiste marine mène une expédition au laboratoire sous-marin Aquarius de NOAA, situé au large de Key Largo, en Floride. L’expédition, rendant honneur au cinquantième anniversaire du projet Conshelf I du Commandant Jacques-Yves Cousteau, permet à Earle et à son directeur adjoint, Mark Patterson, d’étudier les récifs coralliens et la santé des océans.
Le documentaire Netflix, Mission Blue, publié en 2014, retrace, alors, la vie et la carrière de l’esturgeon général, et plus particulièrement l’histoire de cette campagne ayant créée plus de 90 Hope Spots à travers le monde. Sylvia Earle est donc une héroïne de biologie, mais aussi de la conservation de la faune et de la flore marine, dont le nom devrait être (re)connu, et le travail célébré.
Récit
Les femmes cellophanes #2 : Nellie Bly, journaliste d’investigation
Deuxième épisode de notre série consacrée aux femmes « oubliées » avec Nellie Bly. Une femme qui voyagea autour du monde, qui risqua sa vie pour des enquêtes, qui changea des vies et le journalisme pour toujours, dans un temps où les femmes ne devaient pas travailler, où elles n’avaient pas le droit de vote.
Nellie Bly, née Elizabeth Cochran en 1864, vient d’une grande famille d’origine irlandaise si importante que le nom de son village était le sien, Cochran.
Dès son enfance, Elizabeth est très indépendante et têtue. On la surnomme « Pink » car c’est l’une des seules filles de son école portant de la couleur, ce qui était très rare à l’époque. Après la mort de son père, sa mère se remarie rapidement avec un homme alcoolique et violent, puis décide de divorcer. Encore jeune adolescente, elle défend vivement sa mère au tribunal pour qu’elle obtienne raison.
À 15 ans, elle entre dans une école d’institutrices, un des seuls choix de carrière pour une femme à l’époque, mais se fait renvoyer après un semestre car elle ne peut payer les frais de scolarité.
6 ans plus tard, Elizabeth découvre un article du journal local, le Pittsburgh Dispatch, qui décrit à quoi sont bonnes les filles. En difficulté financière et incapable de suivre une formation et trouver un travail, la jeune femme est enragée. Elle répond donc anonymement à l’éditorialiste responsable de l’article, George Madden.
Le directeur du Dispatch, impressionné par sa plume, lance alors un appel pour la retrouver. Elizabeth se rend donc au journal et le directeur lui propose un travail. Nellie Bly, son pseudonyme inspiré par la chanson de Stephen Foster, est alors née.
Elle écrit plusieurs articles couvrant des problèmes sociaux locaux, donc très controversés. Nellie Bly apportait par exemple la lumière sur les mauvaises conditions des ouvriers, ce qui lui coûta sa place. Le journal, sous la pression des patrons des entreprises concernées, lui propose d’écrire pour la rubrique féminine. La journaliste démissionne donc, exaspérée par le sexisme et la lâcheté de son chef.
La jeune femme part alors au Mexique avec sa mère pendant 6 mois et ne peut s’empêcher d’écrire. À son retour, le Dispatch lui propose à nouveau un travail, cette fois pour la rubrique « jardinage ». Nellie décide donc de tenter le tout pour le tout. Elle part donc à New York et dépose sa candidature au New York World.
Le directeur, Joseph Pulitzer, lui commande un article sur les asiles psychiatriques. Nellie décide alors d’enquêter elle-même à l’intérieur d’un asile pendant 10 jours, en se faisant passer pour une malade. Elle s’entraine donc des heures puis passe devant des médecins qui l’envoient immédiatement au Blackswell Island Hospital, un asile psychiatrique pour femmes, à New York.
Elle y découvre les conditions effroyables dans lesquels les patientes sont insultées, battues et sous-alimentées. Nellie revient donc au New York World, ayant mis la pression sur l’hôpital pour pouvoir la faire sortir, ce qui n’était pas une partie de plaisir à l’époque. La série d’articles publiée est si horrifiante qu’un procès est lancé contre le Blackswell Island Hospital et déclenche de grandes reformes dans le pays concernant les asiles psychiatriques. Nellie Bly est depuis considérée comme la pionnière du journalisme d’investigation, militant et social.
Plus tard, le 14 novembre 1889, Nellie Bly quitte New York pour faire le tour du monde en 80 jours, inspiré par le roman de Jules Verne. Malgré les résistances et le scepticisme de son chef, elle part, mais revient après seulement 72 jours.
Entre ses projets fous, ambitieux et polémiques, Nellie Bly fit preuve d’un courage spectaculaire, et d’une force inhabituelle à une époque où les femmes étaient considérablement limitées dans leurs choix et perçues comme de simples ménagères dépendantes des hommes et de leurs maris. Pourtant, la femme est un modèle de journaliste, engagée, courageuse et capable de provoquer de réels changements sociaux.
Aujourd’hui en particulier, face à la masse d’infos qui nous inondent à des fakes news de plus en plus nombreuses et importantes, nous avons besoin d’inspiration de femmes et d’hommes aussi courageuses et courageux que Nellie Bly, n’hésitant pas à mettre leur vie en danger pour dévoiler des mystères et mettre la lumière sur des injustices sociales.